BIENVENUE DANS VOTRE ITORERO !
Chaque génération dans une relative opacité doit
découvrir sa mission, la remplir ou la trahir ! (Frantz FANON)
ITORERO : Pourquoi ce nom ? Que peut-il bien signifier pour le Murundi actuellement ? Que signifiait-il pour le Murundi ancien ? Comment le traduire ?
Comme pour la majorité des mots du kirundi, traduire un mot ancien est particulièrement difficile mais essayons de le faire pour que ceux qui vont lire, participer, enrichir ce site comprennent réellement le sens que l’on veut donner à son orientation, sa stratégie, sa vision, ses missions et ses objectifs !
Le mot ITORERO ou URUTORERE vient du verbe « gutora » qu’on pourrait traduire par « choisir, prendre, sélectionner, trouver, trier », plus récemment en politique « voter, élire » ! La traduction du mot ITORERO serait complète si on y ajoute à ces différentes significations du verbe « gutora », le mot « les meilleurs » ! ITORERO serait donc dans la pratique ancienne au BURUNDI le choix, la sélection, le triage, l’élection des meilleurs ! Ceux qui deviendront « INTORE », Intore z’Uburundi, Intore z’Umwami, les meilleurs, les choisis, les excellents ! La traduction la plus convenable que je peux vous donner est : L’ACADEMIE DES EXCELLENTS !
Pour bien comprendre cette pratique ancienne du BURUNDI pour encadrer, éduquer, responsabiliser la jeunesse du pays, prenons deux exemples parmi les plus parlants d’ITORERO
INTORE
De ce mot si important, on a juste gardé sa partie la moins significative, celle des danseurs Intore qu’on exhibait à toutes les fêtes nationales ou privées, juste pour le folklore ! Dans le Burundi ancien Intore représentait l’élite militaire parmi laquelle le Mwami choisissait sa garde personnelle rapprochée ! La danse, très codifiée, servait à galvaniser les troupes, mimer sa bravoure, montrer son habilité, son attachement à son Chef et à son pays ! Pour arriver à être parmi les Excellents, il y avait tout un cheminement depuis l’adolescence jusqu’au moment où on était choisi pour faire partie des meilleurs, comme Abarenzangemero, ceux qui dépassent les limites ! Dès le jeune âge, les enfants Barundi apprenaient à faire la guerre, le jeune Murundi était initié par son père ou tout adulte chargé de son éducation, à tirer à l’arc, à utiliser le bâton, la lance et le bouclier.
Son éducation de soldat mobilisable était terminée lorsqu’on lui offrait un arc d’adulte. Tout Murundi était donc mobilisable car personne n’échappait à ce niveau de formation. Mais son éducation d’Intore ne s’arrêtait pas là. Reconnu parmi les meilleurs, il continuait son éducation au sein d’Itorero ou Urutorere rw’Umuganwa (L’académie du Prince) puis s’il était jugé Excellent parmi les Excellents, il pouvait intégrer l’Itorero du Roi et être parmi les Intore z’Umwami ! Apprenez donc que les danseurs Intore, ce n’était pas du folklore ! C’est cette organisation, ces échelons de l’éducation militaire qui faisait que les Barundi, ce peuple en armes, était craint de tous ses voisins !
ABATIMBO
Lorsqu’on évoque ce mot aujourd’hui, tout le monde pense à ces jeunes tambourinaires qui s’exhibent aussi dans des fêtes surtout privées et qui se disent « Turi abatimbo » ! Quelle grande méprise ! Vous êtes peut être aujourd’hui des tambourinaires, « abavuzi b’ingoma », mais vous n’êtes pas du tout « ABATIMBO » ! Lorsque notre troupe de tambourinaires du Collège du St Esprit a eu la chance de participer à un Festival de la Jeunesse en 1973, nous étions en compagnie de la très célèbre troupe des « Batimbo » de Makebuko dirigée par un ancien nommé SAVERI qui m’a donné une bonne leçon sur ce corps de métier qu’était les « Batimbo » !
Il m’apprit que le mot « Abatimbo » était un nom de clan, de famille ! Une famille qui faisait partie des familles importantes du Royaume, les Ritualistes (Abanyamabanga) qui gardaient les secrets du Royaume ! Leur famille avait la lourde charge de garder les secrets du Tambour ! Il fallait donc avant tout être de cette famille pour être initié aux secrets et pouvoir fabriquer, jouer, frapper le tambour ! Tout le monde ne devait pas jouer du tambour, c’est au cours de cette initiation qu’on sélectionnait les meilleurs pour choisir le meilleur arbre, bien tanner la peau, pour fabriquer les meilleurs tambours et puis alors choisir les meilleurs danseurs ! L’Itorero des Batimbo se faisait en famille, et comme pour l’armée, tous les Batimbo devaient savoir battre le tambour, connaitre les secrets de la fabrication des tambours sacrés, mais on présentait les meilleurs pour les rituels !
Umushingantahe
Lorsqu’on se penche sur les crises successives si meurtrières que subit notre pays et dont les principales victimes sont les jeunes, nous remarquons que ces crises découlent d’une perte de nos repères, de nos valeurs, qui ont forgé le peuple et la Nation MURUNDI sur plus de cinq siècles ! On pourrait en dire autant du cheminement long pour devenir un « Umushingantahe » ! Du jeune « umukungu », qui suivait les palabres, les jugements sans dire un mot, au vrai « umushingantahe » il y avait tout un processus d’éducation, d’apprentissage et rien n’était laissé au hasard pour inculquer au futur « Mushingantahe » les vraies valeurs d’un juge, arbitre, conseiller, pacificateur, réconciliateur pour la société burundaise !
Qui sommes-nous
Comment pouvez-vous expliquer que pendant plus de quatre siècles, aussi loin que l’histoire de notre région nous permets de remonter, cette région des Grands Lacs ait connu la naissance de plusieurs grands Royaumes qui rivalisaient par leur organisation, leurs institutions fortes, leurs armées, etc… et qu’aujourd’hui, depuis la période des colonisations, cette région ne parvient pas à se retrouver en paix avec elle-même, soutenu par des pays bien structurés, avec des institutions nationales fortes et des hommes fiers d’appartenir à cette région ? Pourquoi nos peuples si proches dans leur culture ne connaissent-ils pas de répit, d’accalmie et que sur plus de cinquante ans, nous ne faisons que déplorer des guerres fratricides, des morts inutiles, la faim et la désolation sans fin ?
L’orientation de ce site c’est avant tout d’arriver à répondre à ces questions, d’investiguer et connaitre l’histoire de notre pays le BURUNDI et partant de tous les Royaumes voisins et semblables, le RWANDA, le BUSHI, le BUGANDA, le NKORE, le BUHA, le BUHAYA, le KARAGWE et au-delà dans la partie qui s’appelle aujourd’hui TANZANIE, KENYA, CONGO, OUGANDA tous ces autres Royaumes agro-pastoraux, petits ou grands qui ont faits nos peuples ! Nos anciens doivent nous livrer leur secrets sinon nous ne serons jamais comme eux, grands bâtisseurs de Royaumes et nous continuerons à nous entretuer, à être autodestructeurs sans même savoir pourquoi ! Nous continuerons à être sans racines, à la merci de tout et de tout le monde !
Ce site, cet ITORERO se veut être un lieu de rencontre, d’apprentissage, d’échanges pour comprendre qui nous sommes, d’où nous venons, de quelles valeurs nous devrions hériter pour que demain les meilleurs INTORE nous montrent où nous devons aller ! Pour y parvenir, nous devons être humbles et admettre que nos anciens étaient plus posés, plus intelligents, plus tournés vers l’essentiel que nous ! C’est au prix de cette humilité que nous pourrons avancer ! Nous devons comprendre la façon dont nos ancêtres ont construit ce pays et ses institutions qui ont tant émerveillé les premiers explorateurs de notre région, non pas à travers les yeux de ces explorateurs qui ont transmis notre histoire en la déformant pour leurs intérêts, mais à travers les dires et les valeurs de nos ancêtres eux-mêmes !
Comme nous ne prétendons pas tout savoir sur le passé du BURUNDI et la vraie vie de nos ancêtres, nous demanderons la contribution de toute personne qui aurait une quelconque parcelle de savoir sur notre passé, UBURUNDI BUKIRI UBURUNDI, de nous aider à transmettre ce savoir à notre jeunesse, de nous aider à développer cet ITORERO ! Nous ne devons pas continuer à transmettre la haine à notre avenir qu’est notre jeunesse, nos ancêtres ne se haïssaient pas, ils ne haïssaient pas leur pays le BURUNDI, quoi qu’on puisse dire, sinon ils n’auraient rien bâti !
En explorant les valeurs anciennes qui ont construits nos Royaumes, nous devrons aussi les comparer aux valeurs actuelles, modernes, d’organisation politique, comme la démocratie, la séparation des pouvoirs, les droits de l’Homme, l’Etat de Droit. Tout ce qui peut nous aider à réfléchir, à voir autrement nos réalités, à inventer de nouvelles pistes de solutions, doit être exploré pour rebâtir nos sociétés sur de nouvelles bases plus constructives, plus libératrices ! Nous devons réconcilier nos peuples avec leur Histoire, leurs Nations, avec eux-mêmes. La réconciliation sous toutes ses formes doit être la ligne directrice de nos actions, c’est la condition sine qua none pour une paix véritable et un développement de nos peuples.
Notre mission sera remplie lorsque les jeunes eux-mêmes se sentiront INTORE z’uBURUNDI, INTORE za AFRIKA ! Fiers de leur pays, fiers de son histoire quelque malheureuse qu’elle ait pu être à certains moments, aimants leur pays, le BURUNDI et ses habitants, les BARUNDI, sans distinction aucune, prêts à relever les grands défis pour faire de ce pays un pays du lait et du miel, un havre de paix où il fera bon vivre ! Et au-delà de notre pays, ces INTORE devront connaitre l’histoire et l’identité de nos voisins, leurs problèmes identitaires si proches des nôtres, pour que les INTORE de notre région puissent véritablement travailler de concert pour une vraie libération de l’AFRIQUE de ses différents carcans hérités de la colonisation et entretenu par une classe politique inconsciente de ses responsabilités vis-à-vis de nos peuples !
Le défi est grand, périlleux, mais la tâche est noble !
BIENVENUE DANS VOTRE ITORERO !