Itorero ou Urutorere

Pourquoi ce nom ? Que peut-il bien signifier pour le Murundi actuellement ? Que signifiait-il pour le Murundi ancien ? Comment le traduire ?

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                BIENVENUE DANS VOTRE ITORERO

 

"Chaque génération dans une relative opacité doit découvrir sa mission, la remplir ou la trahir ! "(Frantz FANON)

  

                      ITORERO : Pourquoi ce nom ? Que peut-il bien signifier pour le Murundi actuellement ? Que signifiait-il pour le Murundi ancien ? Comment le traduire ?

Comme pour la majorité des mots du kirundi, traduire un mot ancien est particulièrement difficile mais essayons de le faire pour que ceux qui vont lire, participer, enrichir ce site comprennent réellement le sens que l’on veut donner à son orientation, sa stratégie, sa vision, ses missions et ses objectifs !

Le mot ITORERO ou URUTORERE vient du verbe « gutora » qu’on pourrait traduire par « choisir, prendre, sélectionner, trouver, trier », plus récemment en politique « voter, élire » ! La traduction du mot ITORERO serait complète si on y ajoute à ces différentes significations du verbe « gutora », le mot « les meilleurs » ! ITORERO serait donc dans la pratique ancienne au BURUNDI le choix, la sélection, le triage, l’élection des meilleurs ! Ceux qui deviendront « INTORE », Intore z’Uburundi, Intore z’Umwami, les meilleurs, les choisis, les excellents ! La traduction la plus convenable que je peux vous donner est : L’ACADEMIE DES EXCELLENTS !

 

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Notre mission sera remplie lorsque les jeunes eux-mêmes se sentiront INTORE z’uBURUNDI, INTORE za AFRIKA ! Fiers de leur pays, fiers de son histoire quelque malheureuse qu’elle ait pu être à certains moments, aimants leur pays, le BURUNDI et ses habitants, les BARUNDI, sans distinction aucune, prêts à relever les grands défis pour faire de ce pays un pays du lait et du miel, un havre de paix où il fera bon vivre ! Et au-delà de notre pays, ces INTORE devront connaitre l’histoire et l’identité de nos voisins, leurs problèmes identitaires si proches des nôtres, pour que les INTORE de notre région puissent véritablement travailler de concert pour une vraie libération de l’AFRIQUE de ses différents carcans hérités de la colonisation et entretenu par une classe politique inconsciente de ses responsabilités vis-à-vis de nos peuples ! 

Le défi est grand, périlleux, mais la tâche est noble !

BIENVENUE DANS VOTRE ITORERO !

   ÇA VA SE SAVOIR ! SEULE LA VERITE SAUVERA NOTRE PAYS

             Lors de la présentation du récent livre de Mr Sylvestre NTIBANTUNGANYA, ancien Président de la République du BURUNDI, « La démocratie piégée », une polémique est née autour de la responsabilité de ce piège en impliquant Mr Pierre BUYOYA, ancien Président de la République du BURUNDI. Cette polémique faisait presque suite à une autre concernant la prétendue implication du Président Pierre BUYOYA dans l’assassinat du Président Melchior NDADAYE, laquelle polémique s’est poursuivie, au grand dam des observateurs, dans les enceintes même de l’UNION AFRICAINE.

                Ce ballet d’accusations-réponses m’a amené à penser à une célèbre émission de télévision intitulée ÇA VA SE SAVOIR, qui nous montre des couples entrain de se déchirer devant des spectateurs avides de connaitre la vérité sur leurs litiges. Cela prêterait à sourire si ces polémiques ne parlaient pas d’événements ayant entrainé des centaines de milliers de morts au BURUNDI, si ces polémiques n’impliquaient pas des personnalités et des Partis politiques, souvent en couples, qui avaient (mais je doute qu’ils l’aient encore) la possibilité de ramener la paix et la réconciliation au BURUNDI.

              Je me suis senti interpellé et quelque peu choqué par le constat amer que la génération politique à laquelle j’appartiens n’a rien compris de la vérité et de la réconciliation que nous avions scellées dans l’Accord d’ARUSHA. J’ai été interpellé aussi pour réagir du fait que j’ai été depuis 1990, un acteur, parfois de premier plan, souvent de second plan, du processus de démocratisation et des différentes tentatives pour ramener ce processus dans le bon chemin pour la paix et la réconciliation, processus mis à mal par des événements antidémocratiques, dramatiques et malheureux. Ces polémiques, à ce moment ci,  ne sont pas du tout encourageantes et j’aimerais amener chaque Murundi à s’interroger sur les responsabilités des uns et des autres et mettre en relations les événements suivants dans la perspective d’une recherche de solutions aux problèmes actuels du BURUNDI : Les lettres polémiques entre le Président Yoweri MUSEVENI et le Président Pierre NKURUNZIZA, les dissensions au sein du CNARED, la démission du Président Benjamin M’KAPA et les non-dits du Sommet des Chefs d’Etat de l’EAC sur le BURUNDI, les prophéties révélations de Mme Denise BUCUMI-NKURUNZIZA, les accusations polémiques du Président Pierre BUYOYA, la reconnaissance du Parti de Mr Agathon RWASA. Quels liens entre ces événements ? Pourquoi ces attaques sur le Président Pierre BUYOYA maintenant et que cachent-elles ? Ces événements ne cassent-ils pas tout espoir de résolution consensuelle et pacifique de la crise burundaise ? A chacun de s’interroger.

 1. LE COUPLE POLITIQUE DE TOUS LES ECHECS

          Les personnalités qui ont échangé des polémiques sur notre démocratie piégée appartiennent à deux Partis politiques les plus importants du BURUNDI depuis les années 1990, ces années de la démocratie piégée. Ces Partis politiques ont rempli à eux seuls au moins 85% de l’espace politique burundais, que ce soit durant le processus de démocratisation, les élections de 1993, les différents Gouvernements qui se sont succédé après le début de la crise d’Octobre 1993 jusqu’au Gouvernement de Transition de 2001 à 2005, en passant par le Partenariat Intérieur entre le Gouvernement du Président Pierre BUYOYA et l’Assemblée Nationale présidée par Mr Léonce NGENDAKUMANA. Ces Partis politiques se sont entendus dans la nuit du 27 au 28 Août 2000 pour modifier l’Accord d’ARUSHA à leur convenance, obligeant les autres Partis du G10 comme du G7 à émettre des réserves lors de la signature de cet Accord malgré tout historique. Comble de l’ironie, le Parti UPRONA signera avec des réserves pour ensuite signer un document avec le FRODEBU pour appliquer l’Accord d’ARUSHA sans réserves, afin de permettre au Président Pierre BUYOYA de diriger une partie de la Transition en tandem avec Mr Domitien NDAYIZEYE du FRODEBU.

               Ces Partis politiques ont voulu montrer à l’opinion nationale et internationale qu’ils étaient les seuls à pouvoir ramener la paix et la réconciliation en se déclarant modérés par rapport à tous les autres considérés comme « petits partis » et pour ceux du G10, comme « petits partis extrémistes tutsis, anti Buyoya ou anti Bururi » (Lire BURUNDI : NI GUERRE NI PAIX, Rapport ICG N° 24, et Pierre BUYOYA, LES NEGOCIATIONS INTERBURUNDAISES). 

           Ces Partis politiques ont géré seuls la Transition de 2001 à 2005 sans être gêné par les « petits partis », pour appliquer l’Accord d’Arusha sans réserves et mener à bien les négociations de cessez-le-feu et la préparation des élections, mais des questions subsistent encore sur l’application de ces Accords. Alors, à lire et entendre leurs échanges, on se demande si réellement ces dirigeants sont conscients des échecs retentissants et de leurs responsabilités dans le processus de démocratisation et le processus de réconciliation qu’ils ont eu la charge de conduire ensemble.

             Je suis entrain de lire le nouveau livre du Président Sylvestre NTIBANTUNGANYA, mais déjà le choix du titre est tout à son honneur car il reconnait d’emblée que notre démocratie a été piégée. J’ai aussi eu l’information et je constate que j’ai été cité dans son livre sur des faits entre 1993 et 1996, certains proches de la vérité d’autres accusatrices sans fondement, mais qui peuvent malheureusement pousser des personnes mal intentionnées à chercher à venger les leurs sur de fausses accusations.

             Je ne ferais pas de polémiques sachant que les critiques ne se font que sur quelqu’un qui a été acteur, mais j’aurais l’occasion de rectifier certains faits relatés faussement dans ce livre. Mais surtout, comme je l’écrivais dans ma lettre à M’KAPA (Novembre 2017) en parlant de l’Accord d’Arusha socle du processus de réconciliation, je le redis encore aujourd’hui : « Nul besoin de dialogue, de négociations, de je ne sais quoi encore pour perdre du temps et de l’argent pendant que les Barundi meurent ! Tout s’y retrouve ! Les tenants des thèses hutus et des thèses tutsis ont conclu l’Accord d’ARUSHA le 28 Août 2000 ; qu’ont-ils encore de nouveau à discuter, à négocier, puisqu’ils ont géré ensemble notre pays pendant ces deux législatures ? »  Nul besoin de polémiques, nous devons accepter nos responsabilités sur les bonnes comme les mauvaises choses que chacun d’entre nous a pu accomplir durant cette dure période de conflit et appliquer le processus de réconciliation sur lequel nous nous sommes entendu.

               Le choix de ces mots, « Démocratie piégée », me ramènent à un article que j’avais écrit quelques mois (Février 2000) avant la signature de l’Accord d’ARUSHA et que j’aimerais que ceux qui polémiquent aujourd’hui relisent : LES RENDEZ-VOUS MANQUES ENTRE BURUNDAIS. Peut-être que cela les mettra d’accord sur l’acceptation et le partage des responsabilités sur cette période cruciale et meurtrière de notre histoire. En voici quelques extraits :

SUR LE PROCESSUS DE DEMOCRATISATION

          Après les événements de NTEGA et MARANGARA de 1988 et la mise sur pied d’un Gouvernement d’Unité Nationale, le processus de démocratisation fut enclenché. Mis à part le fait que ce processus fut organisé par un seul Parti, l’UPRONA, et dans la précipitation, deux erreurs politiques majeures ont ôté à ce processus toutes les chances de réussite.

             1ère erreur : Le refus d’une transition vers la démocratie par le Président BUYOYA et l’UPRONA. Celle-ci aurait permis d’associer certains partis politiques à la gestion du pouvoir, de préparer la population et l’élite à une vraie démocratisation et surtout de débattre des questions conflictuelles dont l’ethnisme et le régionalisme qui n’avaient pas été suffisamment analysées lors des Colloques sur l’Unité.

            2ème erreur : Devant le refus de la Transition, les dirigeants du FRODEBU, pensant à la victoire électorale à tout prix, ont commencé à courtiser des éléments du PALIPEHUTU (à partir de l’affaire RUVYIRO) et les élections furent ethnisées comme celles de 1965. La démocratisation a été piégée dès le départ.

LE PREMIER GOUVERNEMENT FRODEBU

           Bien avant la victoire du FRODEBU et au lendemain de celle-ci, j'avais personnellement discuté avec le Président MNDADAYE sur l’option d'un Gouvernement d'Union Nationale et il étaid'accord.  Poucorriger les erreurs cités, il aurait été utile d'associer au Gouvernement FRODEBU, non pas seulement les partis de la mouvance présidentielle, mais aussi des partis qui avaient fait la campagne électorale (PRP, ANADDE, RADDES..) et qui n'étaient pascomme certains veulent le faire croire, des créations ou des satellites de l'UPRONA.  Malheureusement,  le FRODEBU opta de faire ce qu'ireprochait  à l'UPRONA, prendre des «  tutsis de service »dont la dimension politique était insignifiante,  pour former uGouvernement de large ouverture.  Un autre rendez-voumanqué, qui aurait pu amortir l’impact négatif des élections et freiner certains abus dpouvoir FRODEBU.

LES REACTIONS A L’ASSASSINAT DU PRESIDENT M. NDADAYE

             Tous les partis politiques ont condamné cet acte ignoble qui a plongé le pays dans cette crise profonde à laquelle nous n’arrivons pas à mettre fin. A travers un Groupe d’Associations pour la Paix et les Secours (G.A.P.S.) qui regroupait des partis politiques, des associations de la société civile, des confessions religieuses, nous avons approché les dirigeants du FRODEBU pour leur demander d’adresser à la population des messages de paix. Les réactions de certains dirigeants du FRODEBU, tout en comprenant l’état de désarroi dans lequel ils étaient, furent décevantes et déconcertantes. Je n’en citerai qu’une, la plus désastreuse :

  • Mme L. NDADAYE avait formulé un message d’appel au calme, à l’arrêt des massacres, un message de paix digne de son rang, malgré la douleur qu’elle éprouvait et nous devrions tous admirer cette grandeur. Malheureusement, les dirigeants du FRODEBU ont refusé et empêché la diffusion de ce message de paix, sa diffusion n’interviendra qu’au moment où le génocide et les massacres étaient à leur comble. Si ces dirigeants avaient pensé au peuple burundais, personne n’aurait contesté leur légitimité ou ne les aurait accusés de génocide. Ils auraient pu gouverner, initier des réformes à l’Armée sans problèmes, mais la haine est mauvaise conseillère et la vengeance ne construit pas !

                La signature de l’Accord d’ARUSHA et les compromis obtenus entre eux à l’exclusion des autres Partis, la gestion commune de la Transition, étaient une occasion pour ces deux Partis politiques et leurs dirigeants de redorer leur image politique, de rectifier les pièges de la démocratisation et leurs conséquences désastreuses et de diriger le peuple Murundi vers la voie sincère de la vérité, de la paix et de la réconciliation. Force est de constater malheureusement que ni la vérité, ni la paix, ni la démocratie, ni la réconciliation, ni le développement ne sont au rendez-vous pour le Murundi, 18 ans après la signature historique de l’Accord d’ARUSHA.

                L’Accord d’ARUSHA a-t-il été piégé lui aussi ? Par qui, par quoi et pour quoi ? Comment expliquer que les gestionnaires de la Transition (UPRONA et FRODEBU) aient tout perdu en l’espace de trois ans (2001-2004), leur place politique prépondérante, leur capacité d’influence, leur complicité de couple, leur cohésion interne et le pouvoir partagé tout simplement ? Comment expliquer qu’en moins de trois ans après la signature de l’Accord d’Arusha, ces Partis se soient retrouvés avec chacun trois ou quatre ailes d’un même Parti, dont les responsables, les « Présidents », se débattent encore aujourd’hui pour revenir au pouvoir à n’importe quel prix, même le prix de la compromission, même le sacrifice d’innocentes personnes manipulées pour les besoins de leur cause qui n’est pas une cause nationale ? Comment expliquer que leurs discours n’aient pas changé d’un iota pour parler à leur peuple, maintenant celui-ci dans l’ignorance et l’incapacité d’évoluer parce qu’eux-mêmes n’évoluent pas ?

                   Au lieu de polémiquer, ces importantes personnalités politiques auraient dû reconnaitre leurs erreurs, devenus des fautes, et leur responsabilités, se pencher sur ces pièges et aider à les rectifier. On constate au contraire qu’ils n’ont fait que transmettre ces pièges à la génération politique qui a suivi et qui gère le pays actuellement.

 2. QUAND LES ELEVES DEPASSENT LES MAITRES

           « So akwanka akuraga ivyamunaniye » (Le père qui ne t’aime pas te lègue ce qu’il n’a pu accomplir) est un adage rundi qui colle bien à nos deux principaux Partis politiques et leurs dirigeants qui passent leur temps à s’allier puis se jeter la pierre, à se diviser, mais aussi à vanter leurs bonnes actions et bonnes intentions, que démentissent les événements tragiques du pays. La force d’un père et d’une mère de famille c’est de léguer à leurs enfants des valeurs positives qu’ils pourront consolider ou développer. La force d’une génération c’est de transmettre à la génération suivante des valeurs positives sûres et avec lesquelles continuer à bâtir son pays. Mais c’est aussi avoir la force, le courage d’informer sur ce qui n’a pas marché, sur les pièges qu’on n’a pas pu éviter afin que les générations suivantes ne retombent dans les mêmes erreurs. 

                 La force des Etats Unis d’ Amérique, c’est d’avoir gardé et transmis les fondements institutionnels et les valeurs positives des Pères de l’Indépendance depuis 1776 jusqu’aujourd’hui. La force de la Chine, c’est d’avoir transmis les fondements de la lutte du peuple chinois pour le retour à sa grandeur, et cela de génération en génération, tout en évitant les pièges, qui ne manquent jamais, tout au long de leur histoire. Plus près de nous, la force de Mwalimu Julius NYERERE en République Unie de TANZANIE, c’est d’avoir reconnu l’échec de la politique des villages UJAMAA, une bonne intention mal appliquée, dans la Déclaration d’Arusha, et d’avoir rectifié le tir.

                  Et pour le Burundi d’avant la colonisation, la force de ce Royaume le plus grand de la Région des Grands Lacs c’est d’avoir bâti une Nation, un peuple, sur la base d’Institutions solides, respectées par tous et des valeurs positives dont nous parlons sans pouvoir les pratiquer ou les transmettre car nous n’en maitrisons pas leur signification profonde.

« Vous êtes le chemin et ceux qui cheminent. Et lorsque l’un d’entre vous tombe, il tombe pour ceux qui sont derrière lui, les prévenant de la pierre d’achoppement. Oui, et il tombe pour ceux qui sont devant lui, qui bien qu’ayant le pied plus rapide et plus sûr, n’ont pourtant pas écarté la pierre. Khalil GIBRAN, Le Prophète».

                  L’histoire du BURUNDI contemporain est malheureusement une suite d’événements dramatiques, de plus en plus meurtriers, entrecoupés de périodes d’accalmies qui maintiennent l’illusion de paix et dont profitent certains politiciens pour continuer l’hypocrisie et la manipulation sans écarter les pièges dans lesquels les Burundais sont tombés, mais en les accentuant, de génération en génération. Une histoire qui se répète, une histoire qui piétine. Pour illustrer ce propos, je vous invite à lire cet extrait du discours de Mr Gervais NYANGOMA, alors Directeur Général à la Primature, à l’occasion du 3ème Anniversaire de l’Indépendance du BURUNDI, le 1er Juillet 1965 :

             « En 1962 et au début de 1963, l’action gouvernementale fut marquée par la perte du Premier Ministre assassiné par des jaloux. Le subjectivisme, les réactions sentimentales et les passions de toutes sortes devinrent la source principale d’inspiration dans l’action et le comportement. Les haines et les vengeances devinrent les activités quotidiennes les plus fréquentes. Les intrigues et les coulisses devinrent les méthodes les plus employées. Comme résultat, il y eut la dégradation économique et le pourrissement social. Les prisons furent occupées par plus d’innocents que de coupables. A l’extérieur, on s’aliéna les amitiés de tout le monde, notamment des pays voisins.              En 1963 et au début de 1964, le pays fut marqué par une grande crise d’autorité. Une certaine politique éclairée chercha à s’introduire, mais en vain. Il en découle une instabilité gouvernementale, l’anarchie administrative et l’incurie politique. »

                 Et parlant des Partis politiques, il dit : « Précisément, à la veille de l’indépendance, le BURUNDI se devait de choisir le système le plus adéquat à ses caractéristiques afin d’organiser sa vie sociale, économique et politique. Une multitude infinie de regroupements politiques sans organisation ni programmes naquirent comme des champignons. Seul l’UPRONA sortit vainqueur des élections  législatives de 1961. Ce parti gagnant devint le responsable privilégié du présent et de l’avenir de la Nation entière… Et l’UPRONA comme tout organe vivant ne fut pas immunisé contre toutes les déformations. Pis encore, il confisqua le pouvoir au profit d’une minorité. Aujourd’hui, c’est un rassemblement d’une foule de tendances devenues hostiles et un groupement de multiples intérêts devenus irréconciliables. Un autre groupement qui s’est reconstitué récemment comme plateforme électorale est le Parti du Peuple (P.P.). Il n’a pas de programme et son organisation est de plus primitive et tatillonnes. Donc, voyez-vous, le Burundi n’a pas de Partis politiques digne de ce nom ».

              La situation actuelle n’est pas si différente dans les formations politiques tant à l’intérieur  qu’à l’extérieur du pays. Et l’année 1965, précisément au mois d’Octobre comme en 1993, fut l’année de la 1ère crise ethnique et des premiers morts sur base ethnique, dans un pays sans ethnie, je ne cesserais de le répéter. Depuis lors, les hommes politiques  n’ont pas cessé de sacrifier des milliers de personnes les plus souvent innocentes pour assouvir leur soif de pouvoir et d’argent facile. De génération en génération, les politiciens du Burundi sont régulièrement tombés dans les mêmes pièges sans aucune lueur d’espoir pour le peuple Murundi. La situation de notre peuple n’a pas évolué, au contraire les hommes politiques ont accentué les pièges dans lesquels ils sont tombés, creusant encore plus le fossé entre les fils et les filles d’un même pays, coincés entre les hypocrisies, les mensonges et les manipulations de la classe politique.

               Les hommes politiques qui se chamaillent aujourd’hui se rendent-ils compte qu’ils sont les successeurs d’une longue série de rendez-vous manqués depuis la naissance en 1963, du conflit interne à l’UPRONA, qui a créé les factions CASABLANCA et MONROVIA et dont personne ne connait la vraie origine, mais dont la principale conséquence est le sacrifice de centaines de milliers d’innocentes victimes ? Se rendent-ils compte, malgré de bonnes intentions et initiatives de leur part comme l’Unité Nationale, le processus de démocratisation, le processus de réconciliation, qu’ils se sont fait rattraper par les mêmes pièges que leurs prédécesseurs ? 

                 Et surtout, se rendent-ils compte que leurs successeurs, ceux qui sont le pouvoir d’aujourd’hui, du CNDD-FDD et de l’UPRONA (L’aile tolérée et partenaire du CNDD-FDD), sortent en grande majorité de leurs mouvements de jeunesse, les GEDEBU (Génération Démocratique du Burundi), les JRR (Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore), les PIONNIERS, les JPH (Jeunesse Patriotique Hutu) et autres? Et ceux-ci excellent dans l’hypocrisie, les mensonges, les manipulations, la haine, les vengeances, la corruption à grande échelle, les meurtres ; de vrais professionnels là où leurs ainés n’étaient que de simples amateurs ! Cet état de fait ne fait que renforcer l’opinion qu’en définitive, les bonnes intentions (de démocratie, de réconciliation) de l’UPRONA, du FRODEBU et leurs Leaders n’étaient que des intentions souvent forcées par des évènements extérieurs et non de véritables convictions politiques pour lesquelles on est prêt à se battre pour qu’elles triomphent.

                 Il montre aussi l’incapacité de la classe politique de se sortir des pièges bien connus depuis l’indépendance, l’incapacité de transmettre aux générations suivantes les valeurs positives de ces bonnes intentions, simplement parce que soi-même on n’y croit pas, on ne les vit pas intérieurement. Ne pas s’en rendre compte, ne pas tirer les leçons de cette longue histoire de malheurs et persévérer dans l’erreur est tout simplement de l’aveuglement, de la malhonnêteté, de l’irresponsabilité ! ERRARE HUMANUM EST, PERSEVERARE DIABOLICUM. (L’erreur est humaine, y persévérer est diabolique)

              Comment pouvons-nous ne plus persévérer dans les erreurs ? Comment pouvons-nous, la classe politique de la démocratisation et du processus d’Arusha, reconnaitre nos fautes et nos erreurs, les pièges dans lesquels nous sommes tombés, en tirer les leçons et aider une nouvelle classe politique plus consciente à émerger pour une vraie démocratie, un vrai processus de réconciliation sans pièges ? Comment pouvons-nous aider notre pays à sortir du bourbier dans lequel il se trouve dans l’intérêt de milliers de sinistrés de l’intérieur et de l’extérieur du pays ? Il faut avoir ce courage de se dire les vérités, de reconnaitre ces pièges et en débattre !

                        Messieurs les Ministres (Nous l’avons été, de quelque chose), Messieurs les Présidents (Nous l’avons été, de quelque chose), tous et en particulier ceux qui polémiquent aujourd’hui sur leurs bonnes intentions, leurs réalisations douteuses et qui oublient leurs échecs retentissants, nous avons eu entre nos mains le destin de notre pays le Burundi à un moment donné de son Histoire. Ayons le courage de reconnaître que nous n’avons pas pu lui donner le destin pacifique et réconcilié que la majorité (sans sous-entendu) de notre population sans exclusive attendait et attends toujours. Si nous avons ce courage, prenons donc nos responsabilités pour changer nos analyses, nos ressentiments, nos comportements, pour ne plus sacrifier les générations à venir, nos enfants, nos petits-enfants.

                   Voici un peu plus de 50 ans, le Commandant Martin NDAYAHOZE, alors Ministre de l’Information du Gouvernement MICOMBERO a prédit ce que nous avons vécu tout au long de notre histoire : «  Il est temps de penser à la réconciliation nationale. Il faut oublier les fautes, même les crimes, passer une éponge sur les erreurs commises et s’atteler plutôt à leur trouver le correctif adéquat. A quoi bon entretenir cette tension qui, si elle n’éclatait pas sur nous éclatera à nouveau sur nos enfants ou sur nos arrières petits-enfants. Et ceux-là pourquoi les sacrifions nous ? Construisons du solide et du durable. Ne nous contentons pas de cette demie paix qui, si nous n’y faisons pas attention peut se transformer en commencement de la fin de la Nation burundaise. » Cette prophétie a-t-elle été entendue ? Malheureusement non !

                          Voici quelques années, vingt ans déjà, quelques temps avant sa disparition, un autre prophète, un érudit hors du commun, Nicolas MAYUGI, nous interpellait ainsi, suite aux drames successifs dans la région en général et au Burundi en particulier : « Les Barundi ont-ils compris ? Quelque part, quelque chose me dit que pas encore ou pas assez. C’est pourquoi, continue-t-il, il faut reprendre la parole aujourd’hui pour redire au peuple burundais que le chemin de la division n’aboutit pas, que le chemin de l’exclusion et de la ségrégation n’aboutit pas, que l’idéologie de l’extermination de l’autre et du génocide n’aboutit qu’à une chose : La tragédie qui emporte tout le monde dans les ténèbres de la mort ou, par sursis, dans l’errance de l’exil. » (Mémoire vigilante…)

                         Ces appels nous interpellent encore aujourd’hui, car nos hommes et femmes politiques n’ont pas changé, n’ont pas compris. En toute humilité je me permets de rappeler ces paroles prophétiques de tous ces sages avant nous et de demander aux Ministres (Anciens, présents et à venir), aux Présidents (Anciens, présents et à venir) de ne plus faire la sourde oreille à ces appels qui demandent plus de responsabilités vis-à-vis de notre passé et de l’avenir de nos enfants, nos petits-enfants. Changer est le maître mot et ce n’est pas compliqué, avec moins d’ego et plus de conscience et de responsabilité, c’est possible. Dans le film INVICTUS sur MANDELA et la Coupe du Monde de Rugby en Afrique du Sud, un journaliste croyant piéger le Président N. MANDELA lui demande s’il a changé puisque durant sa détention, il souhaitait la défaite de l’Afrique du Sud. Et MANDELA de lui répondre : « Bien sûr que j’ai changé. Comment voulez-vous que je change les autres si moi-même je ne change pas ? »

                      Changer commence par la reconnaissance des pièges dans lesquels sont tombées les classes politiques successives au Burundi. Je vous invite donc à découvrir bientôt dans la deuxième partie de mon article ces pièges qui nous empêchent de trouver une voie salutaire pour notre peuple et dont les plus importants sont au nombre de quatre. J’essaierais aussi de répondre aux questions posées dans l’introduction. 

Pour la réconciliation du peuple Murundi, je reste debout

Dr Alphonse RUGAMBARARA

 

 

 

 

Commentaires   

#1 Olivier Bany 04-06-2020 12:46
Merci, Dr Alphonse RUGAMBARARA, d'avoir pensé à la mise en place de ce cadre de formation et de partage à fin de savoir bcp plus de notre histoire, car nous sommes une génération dont bcp de vérités nous sont cachées, il nous faut aller nous même la chercher et la partager avec nos frère burundais

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Philosophie "Ubuntu" d'Itorero

   "UBUNTU TWARAZWE NA BASOKURU BUDUTEGEKA UKWUBAHA NO KUGIRA UBUNTU KU KIREMWA MUNTU COSE KUKO DUSANGIYE UBUNTU" : "L'UBUNTU NOUS LEGUES PAR NOS ANCETRES, NOUS OBLIGE A AVOIR DU RESPECT ET PRATIQUER L'UBUNTU ENVERS TOUTE PERSONNE HUMAINE DU FAIT QUE NOUS PARTAGEONS L'UBUNTU"                                                                                                                                                                                                                                                                     La prise de conscience, l’interrogation et la réflexion permanente nous amène à la connaissance de nos maux, de notre histoire, de nos peuples pour une vision conséquente afin de sortir de ce cercle vicieux et bâtir un BURUNDI nouveau, une AFRIQUE nouvelle, avec des leaders responsables, conscients de leurs missions, attachés aux intérêts de leurs peuples. ITORERO sera ce lieu d’échanges et de formation pour les futurs leaders. Le BURUNDI sera le projet pilote, l’AFRIQUE sera l’aboutissement. 

 

Bienvenu sur votre ITORERO

 

Ukuri gushirira mu kuyaga

 

 

 

 

 

  Dr Alphonse RUGAMBARARA,
  Rohero,
  BUJUMBURA, 
  BURUNDI

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Mission et Objectifs

C’est une lutte avant tout contre soi-même, pour se reconstruire d’abord, reconstruire les autres, nos Nations et l’AFRIQUE par le Nationalisme, le Panafricanisme et la philosophie de l’UBUNTU

 « L’humiliation du continent africain ne réside pas uniquement dans la violence à laquelle l’Occident nous a habitués. Elle réside également dans notre refus de comprendre ce qui nous arrive » (Aminata TRAORE).